• Chapitre 20

    Lyanis regarda Rany et Karystean s’éloigner du camp à cheval. Elle se laissa glisser au sol, épuisée.

    « Ça ne va pas, ma violette ?

    - Je manque un peu d’énergie, Lauréan… Je ne suis pas sûre d’être en état de nous emmener chez le marquis de Mirel. »

      L’Yphaste observa les traits tirés de sa compagne. Il s’en voulut de n’avoir pas été assez attentif.

    « Les terres de Queffelec ne sont pas en danger immédiatement. En plus, les manigances de Branag font que personne à la Cité Lumineuse ne fera confiance à notre espèce, surtout porteur de nouvelles aussi incroyables que l’attaque des arkaniens… Sans Rany de Mirel pour nous guider, le comte de Queffelec n’acceptera pas notre aide.  »

      Il ferma les yeux pour se concentrer.

    « Je ne pense pas qu’une attaque se produise avant trois jours : les troupes arkaniennes sont fatiguées de ce qui s’est passé à Fyst. Elles n’avancent pas très vite, surtout avec Moreth et ses fêtes débridées… Repose-toi, ma violette. Nous allons reprendre des forces tranquillement. Nous ne bougerons que lorsque Rany aura réussi sa mission. »

      Lyanis hocha la tête. Elle se laissa tomber près du feu. Elle s’endormit quasiment immédiatement. Lauréan la regarda avec tendresse avant de la recouvrir doucement d’une couverture. Il bâilla à son tour avant de sonder les environs : aucun être conscient à des kilomètres à la ronde, à part leurs amis qui galopaient vers Koralia. Rassuré, il s’allongea et s’endormit à son tour, blotti contre sa bien-aimée.

     ♦♦♦

       La lumière du soleil couchant fit cligner des yeux Lorenzo qui sursauta. À peine une seconde auparavant, la nuit était noire dans la montagne. Maintenant, ils se trouvaient en lisière d’une forêt, sous les rayons rougeoyants.

    « Apparemment, ça a marché ! » commenta le jeune homme tandis que Naéma, aux aguets, étudiait leur position.

    « Savez-vous où nous sommes, amazone ?

    - À une journée des terres de votre oncle Lestian de Mirel, et deux jours de la capitale. Nous ne risquons rien ici. Nous sommes trop loin de Fyst où combat le roi. Nous devons vraiment prendre du repos.

    - Vous avez raison… acquiesça Lorenzo, qui sentait la fatigue peser lourdement sur lui. J’installe le camp.

    - Je pars chasser ! »

      Elle ne lui laissa pas le temps de dire un mot et disparut dans le sous-bois. Un léger sourire effleurait les lèvres du duc de Kilmar lorsqu’il s’attela à sa tâche.

      Quand la jeune fille revint, Lorenzo somnolait devant le feu. Elle s’avança avec précaution pour installer son gibier sur la broche toute prête. Elle songea que dans son sommeil, il avait l’air enfin apaisé. Elle se sentait brusquement sale dans ses vêtements, mal à l’aise et tellement peu féminine. Elle constata avec stupeur qu’elle était en train de regretter de n’avoir pas une de ces extravagantes tenues de cérémonie que la duchesse Aura avait tenu à lui offrir et qu’elle n’avait évidemment jamais mises… Elle devenait complètement folle, maintenant ! Comment pourrait-elle assurer la protection de son maître en robe de bal ? Absurde !

      Elle s’éloigna un peu du campement. Elle avait trop besoin de se rafraîchir, surtout les idées ! Elle regarda furtivement autour d’elle, enlevant à la hâte ses vêtements pour se plonger dans l’eau glacée avec un soupir de bien-être. Elle nagea un long moment avant de sortir de la rivière, un peu délassée. Elle s’enveloppait dans la couverture qu’elle avait amenée, lorsqu’un mouvement aux confins de son champ de vision l’alerta. Elle bondit sur l’intrus. Surpris, Lorenzo vacilla sous le choc et ils s’effondrèrent dans l’herbe mouillée. Mais il réagit immédiatement. La jeune femme se retrouva immobilisée sous son corps, les poignets maintenus au dessus de sa tête, une dague contre sa gorge palpitante.

    « Alors, l’amazone ? murmura-t-il d’une voix rauque. C’est ainsi que vous me protégez ? »

      Naéma essaya de se dégager mais il resserra sa prise sur elle. Son sang palpitait dans ses veines. Elle ferma les yeux devant son sourire narquois, prise dans un dilemme : soit elle s’avouait vaincue, soit elle lui prouvait qu’elle pouvait le désarmer, mais en rompant le serment d’allégeance qui lui interdisait de lever la main sur lui…

      De son côté, Lorenzo était loin d’être à son aise non plus. Il avait juste voulu plaisanter. La situation lui échappait, tandis qu’il plongeait son regard dans celui de la jeune femme. Il sentait son parfum doux, sa respiration saccadée et son propre cœur s’affolait dans sa poitrine, faisant écho aux pulsations de la veine qui battait sur le cou de l’amazone bouleversée.

    - Libérez-moi, s’il vous plaît, mon seigneur… »

      Il n’obéit pas tout de suite, elle se mit à trembler, démunie face à son regard brûlant. Enfin, il la lâcha et s’écarta d’un pas, la regardant se redresser en prenant garde de rester dissimulée par la couverture.

    « Vous êtes si belle, Naéma d’Amariel… murmura-t-il.

    - Ne dites pas des choses pareilles, je vous en prie, messire Lorenzo ! supplia-t-elle d’une voix à peine audible.

      Il s’énerva brusquement.

    - Vous êtes complètement folle pour vous baigner dans le plus simple appareil sans songer aux intrus qui pourraient survenir ! Ou aux bêtes sauvages !

      Elle baissa les yeux.

    - Je vous demande pardon, seigneur, de vous avoir déplu. Ma surveillance ne se relâchera pas désormais et je ne faillirai plus à ma tâche… »

      Lorenzo sursauta, se demandant si… Mais non, elle ne se rendait compte de rien. Il secoua la tête, comprenant qu’elle n’osait pas bouger, de peur que son vêtement improvisé ne tombe. Il ne résista pas à l’envie de la provoquer.

    « Rassurez-vous, mon amazone : que vous vous jetiez dans mes bras ne m’a pas déplu du tout ! Recommencez quand vous voulez ! »

      Elle le fusilla du regard.

    - Enfin une réaction digne de vous ! Je préfère ça à vos paroles empreintes de soumission et de respect ! Vous finissiez par ressembler à une bonne sœur ! »

      Immédiatement, Naéma ploya la nuque.

    - Je vous prie de me pardonnez cet écart…

    - J’abandonne ! » lança-t-il en levant les yeux au ciel. Habillez-vous, le repas est prêt ! »

      Bouleversée, Naéma s’exécuta, se disant que remplir sa mission d’amazone allait se révéler plus ardue qu’avec la duchesse Aura. Surtout si elle n’était pas capable de dissimuler ses sentiments. Elle… Amoureuse… C’était hors de question ! Du duc de Kilmar… Sûrement pas !

      Lorenzo eut beaucoup de mal à s’endormir, partagé entre la peur de l’inconnu dans lequel il était plongé et le désir qui embrasait son corps depuis la petite discussion avec Naéma. Ses rêves furent peuplés de dragons cracheurs de feu qui broyaient l’amazone entre leurs pattes puissantes, les ricanements de Rinaldi résonnaient dans son esprit, lui-même se changeait en démon aux cornes écarlates…

      Il se réveilla aux premières lueurs de l’aube, rassuré de découvrir son amazone près de lui. Son sommeil aussi était agité. Elle gémissait, une larme perla à sa paupière, qu’il cueillit du bout du doigt.

    « Ne tuez pas mon amour ! » hurla-t-elle soudain avant d’ouvrir des yeux aux pupilles dilatés par la terreur. Elle se redressa brusquement, avisant le jeune homme inquiet.

    « Vous êtes vivant ! J’ai cru qu’il vous avait brûlé. J’ai eu si peur de vous perdre… »    

    Il plongea son regard dans les grands yeux clairs anxieux et troublés. Il ne parvint plus à endiguer le flot de son amour pour elle. Il l’embrassa doucement sur le front avant d’effleurer ses lèvres. Elle répondit à son baiser passionné. Le temps leur sembla s’arrêter autour d’eux jusqu’à ce que le hennissement d’une de leurs montures les fasse sursauter. Naéma s’arracha de son étreinte, gênée.

    « Pardon, mon seigneur, je n’aurai pas dû…

    - Pourquoi, plaisanta-t-il, j’embrasse si mal que ça ?

    Elle rougit.

    - Vous savez bien que non, mais ma mission…

    - Au diable votre mission ! jura-t-il, rageur. Vous l’avez accomplie puisque vous m’avez ramené dans votre monde ! Au passage, vous vous êtes emparée de mon cœur. Je vous aime, Naéma. Vous n’êtes pas une lâche ! Regardez-moi dans les yeux et dites-le moi, si vous n’avez rien ressenti dans mes bras hier soir comme ce matin ! »

      Le regard brûlant de défi et d’amour de son seigneur acheva de vaincre ses dernières résistances. Elle laissa enfin libre cours à ses sentiments en jetant ses bras autour de son cou.

    « Mon cœur est vôtre, Lorenzo. Aimez-moi ! »

      Le désir, qui les consumait tous les deux depuis la veille, les emporta.

     


  • Commentaires

    1
    Samedi 15 Août 2015 à 10:32

    oh la la... enfin ;)  ♥____♥ *désolée c'est mon côté niais :p*

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    2
    Samedi 15 Août 2015 à 18:03

    Merde mais elle est en train de tomber amoureuse ! Arrêtez -la ! (quoi ça faisait un moment que je ne l'avais plus fait !) glasses

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